Pénurie d’essence : une matinée folle dans les stations de service à Donsin.

Suite à l’annonce faite par la Société nationale burkinabè des hydrocarbures (SONABHY) concernant des perturbations dans la distribution du super 91 au Burkina Faso, les populations ont pris d’assaut les stations de service pour s’approvisionner en essence. Constat fait ce matin au niveau des stations-services à Donsin.

Une foule immense de clients s’impatienter pour espérer avec du carburant super 91.

Il est 07h48mns lorsque nous foulions notre pied-à-terre sur le marché de Donsin, ce 28 Décembre 2022. On est vite frappé par l’ambiance qui prévaut sur les lieux. Difficile de se frayer un passage lorsqu’on veut traverser la voirie reliant la station à la grande voie. Des moto garées dans les sens, des vélos barricadent les lieux, des bidons en rang d’oignons, à côté sont accostés leur propriétaire. La vigilance s’observe pour ne pas qu’un « malfrat » viole les règles imposées. D’un autre côté, un autre rang est formé. Là aussi, ce sont des bidons de 1,5 litre à 5 litres qui se querellent entre les mains de leur détenteur. Le sourire s’arrache difficilement pour ceux venus très tôt. Difficile de voir le pompiste très occupé et visiblement fatigué.

Fatigués et déterminés, les clients attendent. Ils sont tous frappés par la même inquiétude : « Avoir du carburant et disparaître derrière un nuage de poussière. »

Jean-Marc Compaoré espère un retour à la normale d’ici à demain.

Nous traversons la foule pour continuer notre constat. Nous montons à l’image d’une course sur des dunes de sable les ralentisseurs. Nous faufilons entre les mûrs pour rejoindre le village de Goué situé à environ 1500 mètres. À la descente de la voie du barrage, nous avons l’impression d’une borne fontaine. Une charrette remplie de bidons de toute couleur, des tricycles garés gares çà et là. Quelques citoyens attendent. Un client nous fait savoir que le pompiste a fui à l’insu de ses clients, pour cause « la mésentente entre clients. » Selon ses dires, certains clients auraient passé la nuit sur place avec des bidons pour être les premiers à être servis à l’ouverture de la station le matin. D’autres étant venus le matin avec des motos pour se faire servir se seraient opposés à cela. Ce qui aurait conduit le pompiste à garder close la station en attendant un retour au calme. 
Nous quittons ce lieu pour voir la situation située en plein cœur du marché, à gauche de la voie allant à Loumbila. Là, c’est le vide complète comparé aux autres jours. Seul quelques bidons n’ayant pas eu service apparemment sont toujours posés dans la cour. Plus aucune goutte d’essence ne provient des tubes. 
Nous remboursons chemin pour reprendre nos pas de départ. 

L’espoir une goutte d’essence s’est éclipsé.
A notre retour au marché de Donsin, la station sur place est inondée de monde. Salfo Sawadogo venu s’approvisionner explique son calvaire. « Je suis venu depuis 6 h. Il est presque 9 h maintenant. Je n’ai toujours pas eu. Le rang est très long. La situation m’inquiète. Mais j’ai de l’espoir. Je pense que les autorités sont à notre écoute. Je ne sais pas ce qui se passe en haut (au haut sommet de l’État, ndlr), je sais que le pays n’est pas en paix. Mais j’espère que les autorités vont vite voir cette situation. » A l’image de lui, Jean-Marc Compaoré, 2 petits bidons en main avec une voie sèche et calme est toujours dans l’attente. « Je n’ai pas le choix que de faire le rang. Je suis venu y a longtemps. Si tu travailles loin, tu n’as pas le choix. Il faut attendre et espérer toujours. J’espère aussi que la SONABHY va vite résoudre le problème. Sinon ce n’est pas simple. » Ce n’est pas simple partout. Rasmané Ouedraogo vient de se faire servir. Il est très enthousiaste. « Je suis venu, il y a de cela 1 h. Je viens d’avoir l’essence. J’ai quitté à Taonsgo, un village situé à environ 5 km de Donsin, pour venir chercher l’essence ici. J’ai eu seulement 2 litres. Pour aujourd’hui, je pourrai faire mes courses, mais je ne sais pas comment sera demain. » 


Le rang semble n’a pas bougé du côté des bidons de 20 litres, pour la plupart vendeurs au marché noir. Lorsque nous retournons une seconde fois à Goué, nous constatons que les services ont repris au niveau de là, désormais seule station-service de la localité. « Aucun bidon ne doit être ajouté au rang des bidons déjà formé. Nous avons passé la nuit ici et nous avons tout vu » lance un client. Et un autre d’ajouter : « On en peut plus avec les motos. Servez les bidons. » Ici, le privilège semble être accordé aux motocyclettes et aux automobiles qu’aux revendeurs du marché noir. 
Un autre gombo pour les revendeurs.
IK, revendeur, a passé la nuit au niveau de la station. Il explique : « Je suis venu ici hier à 14 h. J’ai quitté à Ziniaré pour venir ici, mais je n’ai toujours pas eu. Le froid nous a soufflées ici. Ce matin, le pompiste avait ouvert. Mais il a pris la fuite lors des débats entre nous venus hier et les nouveaux de ce matin. Mais Dieu, merci, on s’est compris maintenant. J’attends toujours. Mais j’ai peur que je ne puisse pas avoir. C’est le bras de fer ici, je suis sur mes gardes en tout cas.» 

Le rang des bidons à la station service à l’entrée de Goué.

Issaka Ouedraogo, venu chercher de l’essence pour sa machine est dans l’inquiétude. « Je suis venu avec un bidon de 20 litres. Il me faut de l’essence pour mes machines. On en a besoin pour arroser nos plantations. Je suis venu depuis 3h du matin. Je m’inquiète beaucoup. C’est parce que les gens veulent prendre beaucoup pour aller stocker et revendre. Sinon, tout le monde allait en avoir. »

Issaka Ouedraogo vient chercher de l’essence pour ses machines.

Au moment où nous sommes sur ce lieu, nous apprenons que le litre du super 91 est vendu à 1000f dans le marché noir à Donsin. Après vérification, nous obtenons confirmation de la part des clients sur les lieux. A 10h05mns, la station d’essence à Donsin a fini de vider son contenu. Sur le marché noir, la disponibilité est effective mais à un prix exorbitant. « 1000f pour nous les pauvres, c’est difficile. Je préfère laisser mes plantations d’oseille souffrir voir mourir que de payer ça et aller mourir de faim » marmonne une vieille femme, visiblement découragée de la flambée du prix. Certains riverains dénoncent ces pratiques illégales à visage découvert et sont impatients de voir un contrôle de la part des autorités.

Au moment où nous bouclions cet article, nous apprenons que le prix du litre du super 91 vendu sur le marché noir est vendu à 1250f à Kartenga, un village situé à environ 2 km de Donsin.

Issa Sidwayan TIENDREBEOGO

Malgré,un communiqué et un passage à la Radio Télévision du Burkina (RTB) du ministre en charge du commerce et de l’industrie Serge Poda. La population se rue toujours dans les stations-services pour faire des réservations du carburant super 91

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