Contrebande de carburant Nigeria-Burkina : 72 personnes en garde à vue selon le procureur Yodada in

Le 06 août 2019, l’Autorité Supérieure du Contrôle d’Etat et de Lutte contre la Corruption (ASCE-LC) recevait une dénonciation  faisant cas de la commission sur le territoire Burkinabé, de faits de contrebande de carburant à grande échelle. Le carburant en question proviendrait du Nigéria en passant par le Bénin pour être stocké à Koualou, localité située à une dizaine de kilomètres de Nadiagou à l’Est du Burkina Faso. Selon cette source, les trafiquants se ravitailleraient  à Koualou et les produits seraient transportés dans des fûts à l’intérieur de camions appelés « 10 tonnes » à destination de Fada N’Gourma, Koupéla, Pouytenga, Zorgho, Mogtedo, Minassem (Koulbila) et Ouagadougou. Le dénonciateur ajoutait que d’un point de vue organisationnel, les contrebandiers se livrant à ce trafic se seraient repartis les axes routiers suivants dans la commission de leur forfait :

– l’axe Nadiagou—-Fada N’Gourma ;

– l’axe Nadiagou—-Koupéla ;

– l’axe Nadiagou—-Mogtedo ;

– l’axe Nadiagou—-Minassem .

Suite à cette dénonciation mentionnant des faits aussi graves, une mission exploratoire de l’ASCE-LC dans la région de l’Est, en février 2020, a permis de recueillir des indices concordants tendant à la confirmation des faits évoqués dans la dénonciation.

Nantis des informations recueillies par la mission, l’Autorité Supérieure du Contrôle d’Etat et de Lutte contre la Corruption, conformément à l’article 241-8 du Code de Procédure Pénale, informait mon parquet des faits ci-dessus évoqués.

L’enquête ouverte des chefs de contrebande aggravée , blanchiment de capitaux, corruption, à l’effet d’élucider les faits mentionnés par le dénonciateur permettait d’identifier des dépôts illicites des produits d’hydrocarbures de contrebande dans les localités de Ouagadougou, Komsilaga, Mogtédo, minasom-nagréongo, Zorgho, Kombissiri, Kaya, Tenkodogo, Fada N’Gourma …

Aussi, des stations-services  bénéficiaires de ce carburant de contrebande  étaient identifiées à Ouagadougou, Kombissiri, Kaya…

Enfin, les principaux auteurs des faits de contrebande  étaient identifiés dans les régions  de l’est, du centre est, du centre nord, du plateau central, du centre sud et du centre ;

En plus, il résultait des investigations menées par l’ASCE-LC, que les contrebandiers commettent leur forfait principalement en temps de nuit, soit par le transport de l’hydrocarbure liquide à l’aide de camions spécialement aménagés à l’intérieur desquels ils rangent cent quatre-vingt (180) à deux cent (200) fûts industriels en caoutchouc ou en fer de 200 litres chacun remplis de carburant en les superposant souvent par deux ou trois, mais pas conformement aux normes de transport d’hydrocarbures, soit à l’aide de citernes qui n’ont aucun document délivré par la SONABHY pour le chargement du carburant.

Ces faits ont été constatés sur les axes routiers bitumés suivants :

– Ouagadougou- Nagréongo (Minassem ou Koulbila)-Mogtedo- Zorgho-Koupéla-Fada N’Gourma- Pama-Nadiagou- Koualou (RN04 et RN18) ;

– Ouagadougou – Koupéla-Fada N’gourma- Kantchari (RN 05) ;

Relativement à l’axe routier Ouagadougou-Kombissiri- Toécé- Nobéré-Po- Dakola (RN 05), les contrebandiers utilisent des véhicules berlines pour la commission de leur forfait. En effet, lesdits véhicules sont démunis de leur siège arrière afin d’agrandir leur capacité à contenir les bidons de carburant de contrebande.

Il convient d’indiquer qu’un constat de terrain a permis  de relever que ces véhicules se rendent à Koualou souvent dans la matinée en vue du ravitaillement pour ensuite durant la nuit, entre 22 heures et 03 heures du matin, repasser dans le sens contraire. De la sorte, au lever du jour ils ne sont plus aperçus sur les routes nationales.

A l’aller comme au retour, les contrebandiers passent les différents types de contrôles routiers précisément les postes de douane, de police et de gendarmerie sans aucune difficulté comme s’ils accomplissaient des activités licites.

Au regard de ces éléments, mon parquet en synergie d’action avec le ministère de la sécurité et l’Autorité Supérieure du Contrôle d’Etat et de la lutte contre la Corruption a lancé, du 17 septembre 2021 au 20 septembre 2021, une vaste opération à l’effet d’interpeller les personnes impliquées dans les faits infractionnels en cause, de procéder aux saisies des moyens servant à la commission des faits et à la mise sous scellés des différents dépôts d’hydrocarbure de contrebande.

Cette opération a permis :

– d’interpeller  soixante-douze personnes actuellement en garde à vue pour les besoins de l’enquête ;

– de saisir des pièces documentaires et des numéraires en lien avec les activités illicites des mis en cause et une importante quantité de produits de contrebande, des moyens roulants et autres biens servant à la commission des faits ;

– de sceller des stations-service et dépôts ;

Toutes ces actions ont été accomplies dans un environnement sécurisé grâce  à l’encadrement  sécuritaire  des éléments de la gendarmerie nationale qu’il convient de saluer.

L’enquête ouverte des chefs de contrebande, blanchiment de capitaux, de corruption conformément aux articles 261, 262, 263 du Code des douanes ,  les articles 2, 7, 113, 114,115, 117 118 de la loi 016-2016 du 03 mai 2016 , relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, l’article 42 de la loi n°004-2015/CNT du 03 mars 2015 portant prévention et répression de la corruption au Burkina-Faso et les articles 331-1 et 331-2 du Code Pénal de 2018 suit toujours son cours et les auditions et interpellations nécessaires se poursuivront afin de mettre fin à ces infractions qui non seulement paralysent l’économie nationale mais également sont constitutives de sources de financement du terrorisme.

Je lance un appel à toute personne qui aurait des renseignements de nature à mettre en exergue des faits de contrebande de carburant à faire une dénonciation anonyme au parquet le plus proche  et à toute unité de police judiciaire.

Par la présente occasion, je tiens à remercier Monsieur le ministre de la sécurité qui, par son engagement, a fourni les moyens multiformes pour la mise en œuvre de l’opération.

Je remercie également le Contrôleur Général d’Etat qui, par son ferme engagement, a mis tout en œuvre pour la préparation et l’exécution de l’opération.

Mes remerciements vont également aux éléments de la Gendarmerie Nationale, de la Police Nationale et aux officiers de police judiciaire qui se sont pleinement investis pour la réussite de l’opération.

Ouagadougou le 23 septembre 2021

Le Procureur du Faso

YODA Harouna

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