La charte de Kouroukan-Fouga ou la charte du Mandé est un ensemble de règles juridiques ou sorte de constitution proclamée en 1236 par l’empereur de l’empire du Mali (Sondiata keita, 1190-1255) à Kouroukan-Fouga (plaine située à Kâaba à la frontière entre le Mali et la Guinée-Conakry).
Article 1 : La société du grand Mandé est divisée en seize (16) porteurs de carquois, cinq (5) classes
de marabouts, quatre (4) classes de Nyamakalas (hommes de caste), une (1) classe de serfs (esclaves)
(Mofé molu). Chacun de ces groupes a une activité et un rôle spécifiques.
Article 2 : Les « Nyamakala »se doivent de dire la vérité aux chefs, d’être leur conseiller et de défendre par le verbe, les règles établies et l’ordre sur l’ensemble de l’empire.
Article 3 : Les « Mori kanda » sont nos maîtres et nos éducateurs en islam. Tout le monde leur doit respect et considération.
Article 4 : La société est divisée en classe d’âge. A la tête de chacune d’elles est élu un chef.
Sont de la même classe d’âge les personnes (hommes ou femmes) nées au cours d’une période de trois années consécutives.
Les « Kangbè » (classe intermédiaire entre les jeunes et les vieux) doivent participer à la prise des grandes décisions concernant la société.
Article 5 : Chacun a le droit à la vie et à la préservation de son intégrité physique .
En conséquence, tout acte attentatoire à la vie d’autrui est puni de mort.
Article 6 : Pour gagner la bataille de la prospérité,il est institué le « Könögbèn Wölö »
(Un mode de surveillance pour lutter contre la paresse et l’oisiveté).
Article 7 : Il est institués entre les Mandenkas le « Sanankunya » (cousinage à plaisanterie et le « Tanamanyöya » (forme de totémisme).En conséquence, aucun différend né entre ces groupes ne doit dégénérer, le respect de étant la règle .
Entre beaux- frères et belles -sœurs,entre grand parents et petits-enfants, la tolérance et le chahut doivent être le principe.
Article 8 : La famille KEITA est désignée famille régnante sur l’Empire.
Article 9 : L’éducation des enfants incombe à l’ensemble de la société.La puissance paternelle appartient par conséquent à tous.
Article 10 :Adressons-nous mutuellement les condoléances.
Article 11 : Quand votre femme ou enfant fuit, ne le poursuivez pas chez le voisin .
Article 12 : La succession étant patrilinéaire, ne donnez jamais le pouvoir à un fils tant qu’un seul de ses pères vit.
Ne donnez jamais le pouvoir à un mineur parce qu’il possède des biens .
Article 13 : N’offensez jamais les « Nyaras » (paroliers attitrés)
Article 14 : N’offensez jamais les femmes, nos mères.
Article 15 : Ne portez jamais la main sur une femme mariée avant d’avoir intervenir sans succès son marie.
Article 16 : En plus de leurs occupations quotidiennes, les femmes doivent être associées à tous nos gouvernements.
Article 17 : Les mensonges qui ont vécu et résisté 40 ans doivent être considérées comme des vérités.
Article 18 : Respectons le droit d’aînesse.
Article 19 : Tout homme à deux beaux parents : les parents de la fille que l’on n’a pas eu en mariage et la parole qu’on a prononcée sans contrainte. On leur doit respect et considération.
Artticle20 : Ne maltraitez-pas les esclaves, accorde-leur un jour de repos par semaine et faite en sorte qu’ils cessent le travail à des heures raisonnables. On est maître de l’esclave, mais pas du sac qu’il porte.
Article 21 : Ne poursuivez-pas de vos assiduités les épouses : du chef du voisin, du marabout du féticheur, de l’ami et de l’associé.
Article22 : La vanité est le signe de la faiblesse et l’humilité le signe de la grandeur.
Article23 : Ne vous trahissez jamais entre vous. Respectez la parole d’honneur.
Article 24 : Ne faite jamais du tort aux étrangers.
Article25 : Le chargé de mission ne risque rien au Manden
Article 26 : Le taureau confié ne doit pas diriger le parc.
Article 27 : La jeune fille peut être donnée en mariage dés qu’elle est pubère sans détermination d’âge. Le choix de ses parents doit être suivi quel que soit le nombre des candidats
Le jeune garçon peut se marier à partir de 20ans
Article 28 : La dote est fixée à 3 bovins : 1 pour la fille, 2 pour mère et père.
Article 29 : Le divorce est toléré pour l’un des causes ci-après :
– L’impuissance du mari,
– La folie de l’un des conjoins,
– L’incapacité du mari à assumer les obligations nées du mariage
Le divorce doit être prononcé hors du village.
Article 30 : Venons en aide à ceux qui en ont besoin
Article 31 : respectons la parenté, le mariage et le voisinage.
Article 32 : Tuez votre ennemi, ne l’humiliez pas.
Article33 : Dans les grandes assemblées, contentez-vous de vos légitimes représentants et tolérez-vous les uns les autres.
II – DES BIENS :
Article 34 : Il y a cinq façons d’acquérir la propriété : l’achat, la donation, l’échange, le travail, et la succession. Toute autre forme sans témoignage probant est équivoque.
Article35 : Tout objet trouvé sans propriétaire connu ne devient propriété commune qu’au bout de quatre ans.
Article 36 : La quatrième mise basse d’une génisse confiée est la propriété du gardien
Article37 : Un bovin doit être échangé contre quatre moutons ou quatre chèvres
Article 38 : Un œuf sur quatre est la propriété du gardien de la poule pondeuse.
Article 39 : Assouvir sa faim n’est pas du vol si on n’emporte rien dans son sac ou sa poche.
III – DE LA PRESERVATION DE LA NATURE
Article 40 : La brousse est notre bien le plus précieux, chacun se doit de la protéger et de la préserver pour le bonheur de tous.
Article41 : Avant de mettre le feu à la brousse, ne regardez pas à terre, levez la tête en direction de la cime des arbres.
Article 42 : Les animaux domestiques doivent être attachés au moment des cultures et libérés après les récoltes. Le chien, le chat, le canard et la volaille ne son pas soumis à cette mesure.
IV – DISPOSITION FINALES
Article 43 : Balla Fasséké KOUYATE est désigné grand chef des cérémonies et médiateur principal du Manden. Il est autorisé à plaisanter avec tous les tributs, en priorité avec la famille royale.
Article 44 : Tous ceux qui enfreindront ces règles seront punis. Chacun est chargé de veiller à leur application sur l’ensemble du territoire impérial.
Depuis 2009 la charte du Mandé a été Classée” patrimoine culturel immatériel de l’humanité” par l’Unesco , cette charte au-delà de ce statut culturel, est faisait office de constitution.Nos juristes contemporains devraient encore s’inspirer de cette valeur juridique endogène.
Texte Transcrit par :
M. SIRIMAN KOUYATE